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lundi 6 juillet 2009

le théâtre (d'Alice) et les réverbères


aimer c'est pas la mer à boire, pourtant t'as du mal à aimer hors tes rêves
les épis dans ta boîte aux lettres c'est l'affection de la terre pour ton silence, ton faible pour le clair de lune qui tords ses couleurs sur ce champs
enraciner tes lèvres sur l'épaule droite de la lune
un beau jour tu vas réécrire mes poèmes, tu vas leur apprendre à faire l'amour en s'adonnant aux métaphores... mon écriture s'approprie la couleur mystérieuse de tes yeux
ils sont comment, tes épaules?

hier soir un fou est tombé amoureux de la grâce métallique des tramway, il courrait après, les embrassait, leur répétait les plus tendres mots du français, c'est que les trams dans cette ville sont plus beaux que les victoires de Samothrace
on l'a retrouvé immobile, les rails dans ses bras, à l'autre bout de la ville
pauvre fou, il n'a pas pu comprendre que l'amour est un jeux cruel, seul les humains y sont admis

la concordance des temps est une danse, pas de deux, verbes et actions, tu papillotes à droite, c'est le futur qui te retiens dans ses bras, à gauche, emmailloté de vers, le passé t'invite à un rond de flash back,
passo doble. un-deux-trois, un-deux-trois
wilkommen, binevenue dans le plus théâtral des théâtres au monde, ici-même les acteurs jouent pour leur propre plaisir, pas de scénarios, pas de pièces, pas d'clair de lune, on improvise, on meurs et on réssuscite sur à l'ombre des réverbères en fleurs, je suis votre psy, regardez-moi dans les yeux, Mlle, merde, encore la codépendance, cette chasse aux rossignols qui me fait mal
vous sentez vous à l'aise sur le fameux canapé bleu?
écrasez-vous souvent vos lunettes?
aimez-vous les trams ou préférez-vous les fourmis? un petit bisous pour chaqu'une de ces bêtes minuscules, ça fait tourner la tête, hein?
je rêve souvent de tes épaules, des vers en hiéroglyphes que j'y écris avec le bout de la langue, le bout de français est un réverbère...

- Bonjour. Pourquoi viens-tu d'éteindre ton réverbère ?

- C'est la consigne, répondit l'allumeur. Bonjour.

- Qu'est-ce que la consigne ?

- C'est d'éteindre mon réverbère. Bonsoir.

Et il le ralluma.

- Mais pourquoi viens-tu de le rallumer ?

- C'est la consigne, répondit l'allumeur.

- Je ne comprends pas, dit Alice.

- Il n'y a rien à comprendre, dit l'allumeur. La consigne c'est la consigne. Bonjour.

Et il éteignit son réverbère.

Puis il s'épongea le front avec un mouchoir à carreaux rouges.

- Je fais là un métier terrible. C'était raisonnable autrefois. J'éteignais le matin et j'allumais le soir. J'avais le reste du jour pour me reposer, et le reste de la nuit pour dormir…

- Et, depuis cette époque, la consigne a changé ?

- La consigne n'a pas changé, dit l'allumeur. C'est bien là le drame ! La planète d'année en année a tourné de plus en plus vite, et la consigne n'a pas changé !

- Alors? dit Alice.

- Alors maintenant qu'elle fait un tour par minute, je n'ai plus une seconde de repos. J'allume et j'éteins une fois par minute !

- Ça c'est drôle ! Les jours chez toi durent une minute !

- Ce n'est pas drôle du tout, dit l'allumeur. Ça fait déjà un mois que nous parlons ensemble.

- Un mois ?

- Oui. Trente minutes. Trente jours ! Bonsoir.

Et il ralluma son réverbère.

Alice le regarda et elle aima cet allumeur qui était tellement fidèle à la consigne. Elle se souvint des clairs de lune qu'elle-même allait autrefois chercher, en tirant sa chaise. Elle voulut aider son ami :

- Tu sais… je connais un moyen de te reposer quand tu voudras…

- Je veux toujours, dit l'allumeur.

Car on peut être, à la fois, fidèle et paresseux.

Alice poursuivit :

- Ta planète est tellement petite que tu en fais le tour en trois enjambées. Tu n'as qu'à marcher assez lentement pour rester toujours au soleil. Quand tu voudras te reposer tu marcheras… et le jour durera aussi longtemps que tu voudras.

- Ça ne m'avance pas à grand'chose, dit l'allumeur. Ce que j'aime dans la vie, c'est dormir.

- Ce n'est pas de chance, dit Alice.

- Ce n'est pas de chance, dit l'allumeur. Bonjour.

Et il éteignit son réverbère.


le 19 octobre 2019

un ange aux sales sourires fume le dernier jour du reste de ta vie, il a les pieds cloués contre le quai du lac, ses ailes en bois pèsent sur ta conscience fragile

- Alice, entre dans la boîte d'à côté. Mr. Py t'attends à une dernière tasse de pluie. Drôle de vie, il s'évanouit lui aussi, les règles non rien à foutre dans la raison implacable du temps.

un ange aux faux masques vous conduira vers le Styx, n'oublie surtout de prendre tes verbes pour les noyer dans l'alchimie du néant

bien joué! bois encore cet ancre et laisse-moi voir tes épaules à la lumière faible des réverbères apprivoisés

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