Alice a vu la lumière du jour avec un vaste manuscrit sur sa paupière droite. La paupière gauche, plus proche du coeur, est le miroir de ses prières.
Son enfance, un vaste champ de coquelicot, texte fragmentaire au goût vaguement cioranien ou les formes et les parents sont des figures filiformes d'un dieu Giacometti. Alice aime le beau, sans réserve, sans snobisme, un sentiment pur, impulsiv et grand comme un Orénoque traversant la jungle de la réalité. L'art pour l'art est une peine perdue à ses yeux. Si ce n'est pas une révélation, l'art est juste un passe temps de snob. Je sais plus si je suis d'accord avec cette pensée, mais elle a un argumentaire qui s'avère plus qu'une tentation. Son vaste imaginaire de la perception du beau à la colonne de l'infini comme point d'équilibre. Ses traits sont douces et précises comme celles de la muse endormie de Brancusi.
Alice a dévore Freud depuis un âge précoce, lecture tordue et inquiétante qui l'a sans doute façonnée plus qu'elle ne voulait à cette époque. Enfant douée pour les rêveries et le sens du beau, elle cultiva vite un arrière goût pour le mal de siècle.
Alice adore voyager. Le voyage comme descente mystique dans les profondeurs de son âme, le voyage à double dimension à travers les jardins de Gaudi à côté d'un personnage inerte alimentant ses insomnies. Elle a un faible pour Bach, la poésie (Rilke tout récemment, qu'elle a lu la nuit précédente jusqu'à trois heures du matin) et les salades dont elle parle comme d'une symphonie de saveurs.
Elle a dû vivre dans l'Egypte ancienne dans une de ses vie passée, car elle garde en elle une adoration presque païenne pour les chats. C'est une de ses grandes faiblesses. Elle garde des heures à regarder le chat philosophe sur le balcon de vis-à-vis et il n'y aurait pas de meilleur cadeau qu'un chaton.
Le coup de foudre met Alice en face du Musée Dali (à Paris). Elle y passe de longues heures à promener son regard dans la douceur érotique des formes du grand peintre, se laisse aller dans la librairie du musée et y achète La vie secrète de Salvador Dali par Salvadori Dali qu'elle lit en moins de deux heures sur un banc dans la Gare de Saint Lazare. En fait elle lit beaucoup et surtout elle lit vite. Le temps que je prends pour lire, elle va accumuler des relectures jusqu'à une communion avec l'oeuvre. C'est aussi valable pour les films et le théâtre. Elle peut aller voir un film une douzaine de fois et chaque fois elle le vit, elle le découvre avec un naturel digne des meilleures description du réalisme magique. Au délà de la fascination que j'ai pour son goût de la relecture, je ne peut être que jaloux, car j'arrive très rarement à relire un livre.
Alice n'a pas encore l'âge de Dante, mais elle est une habitué des labyrinthes, des insomnies tordues. Elle connait plusieurs descentes aux Enfers. Mais à la différence du grand classique italien, Alice traverse le Styx dans les bras d'un saint oriental. Son itinéraire a connu une traversée du désert, longue et sinueuse. Désert la fait filiforme, Alice en paillon dont les couleurs s'imprègnent dans l'imaginaire de mon écriture. Alice a connu le noir, maligne et douloureux. Prière et méditation ont fait d'elle une accumulation de philosophie et de résignation révélatoire. Elle aime la vie. Chaque instant est une importante découverte, la possibilité d'une histoire d'amour avec l'âme cachée du monde que l'on peuple. Au bout de sa traversée de la nuit elle découvre la lumière sur une petite île en Mer Egée. C'est une constante dans ses itinéraires spirituels.
Elle m'accorde avec générosité un lieu important dans cet sinueux itinéraire. Sans aucun doute les mots que l'on dit on plus d'importance qu'on ne le croit. La vie des mots dépasse le scépticisme journalier de nos rythmes galopants, un mot raisonnant dans l'oreille de l'autre peut déclancher une avalanche, peut faire rennaître, peut écraser sous le poids banal d'une sémantique mal-calculée. J'ai dû par un heureux hasard prononcer LE mot, bref signifiant qui a traversé tout les dimensions de son âme. Le mot qui se déplaçait avec une vitesse qu'on peut pas mesurer en photons, ces mirifiques syllabes s'étant lovées autours de attentes les plus obscures de son âme.
Les épiphanies d'Alice sont un chapitre à part. D'une intensité sans précédent, elle t'écrit le texto le plus inspiré du monde alors que tu ne t'attend point ce jaillissement. Elle vie en Sybille de Delphi, vous fait entrer dans la macération de ses rêves, vous ouvre les porte d'un monde que l'on croyait inconcevable auparavant et un soir, en pleine obscurité, ses lèvres ont imprégné l'éternité (ou le néant?!) sur celle de son auteur. De quoi en perdre la raison...
Alice berce ses joies et ses mélancolies au coeur même du petit Montmatre dans une bourgade lacustre et bien que ce quartier bohème soit un Montmarte second hand, elle y vit une plénitude printanière sans réserve. Elle connait toutes les petites ruelles autour de son modeste chez soi. Elle a l'esprit lacustre et bien qu'elle soit fascinée par les montagnes, le lac et la mer l'attirent davantage.
il est cependant impossible de tout dire sur cet âme poète dans une si brève reflexion. ce n'est qu'un lent début d'une longue série de méditation sur ce personnage réel qui ne cesse point de me fasciner par la vaste nef de son univers. on ne pourra jamais tout dire sur Alice comme il est bien impossible de tout dire sur la lune, car même si on la voit et on lui parle tous les jours, son aura de mystère n'a rien perdu de son éclat...
Aujourd'hui, si on lit avec attention dans ses paumes, on voit que toutes les lignes y tissent un seul grand mot - LA VIE...
A SUIVRE
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire